On savait déjà que les femmes adeptes du haut niveau au marathon ont un désir sexuel diminué. Des recherches viennent de montrer qu’il en va de même chez les hommes très sportifs.
Une activité physique régulière permet de mieux connaître son corps, d’avoir une bonne estime de soi et de se sentir plus désirable dans un corps bien sculpté: tout cela est nécessairement bon pour la libido. Mais, en la matière, point trop n’en faut: le sport de haut niveau peut aussi se traduire par une grande fatigue à la fois physique et psychique, et être associé à un désir sexuel diminué.
«C’est un fait bien connu. Les marathoniennes qui s’entraînent de manière intensive, surtout lorsqu’elles sont très maigres, présentent souvent des troubles du cycle avec un blocage de la fonction ovarienne, qui se traduit par l’absence de règles, explique le Pr Patrice Lopès, gynécologue et ancien directeur de l’enseignement de la sexologie des CHU de l’Ouest. Or, ces perturbations viennent du cerveau. Entre autres, la sécrétion d’endorphines et de prolactine est bouleversée, et cela a aussi un effet sur la libido.»
Ainsi, un effort prolongé lors d’entraînements sportifs quotidiens pousserait le cerveau à sécréter des endorphines, ces protéines abusivement qualifiées «d’hormones de l’amour»: une fois libérées après l’orgasme, ces endorphines se fixent sur les mêmes récepteurs que ceux de la morphine. Or, les protéines en question, au-delà de leurs effets antalgiques et apaisants, ont également pour action d’inhiber la sécrétion d’autres hormones de l’hypophyse, la FSH et la LH, qui jouent un rôle majeur dans l’ovulation. Or, plusieurs études ont montré que l’ovulation va normalement de pair avec une hausse de la libido, via des pics de testostérone et d’œstradiol.
Pratiqué modérément, le sport est bénéfique Mais qu’en est-il chez l’homme? C’est la question à laquelle ont voulu répondre, il y a deux ans, le professeur Anthony C. Hackney et ses collaborateurs. À l’université de Caroline du Nord, aux États-Unis, son équipe s’intéresse de près aux effets du stress sur la production des hormones. En préalable à l’analyse de prélèvements sanguins de sportifs, les chercheurs ont entrepris d’interroger les intéressés via un questionnaire en ligne portant sur la durée et l’intensité des entraînements, ainsi que sur la libido. Près de 1 100 hommes adeptes de course à pied, de cyclisme et de triathlon se sont prêtés à l’expérience. D’après leurs réponses, les sportifs qui pratiquaient le plus longtemps et le plus intensément étaient aussi ceux dont la libido était la plus faible. Et inversement.
Pour les chercheurs, ces résultats ne permettent pas d’affirmer que l’excès de sport déclenche une baisse du désir sexuel, mais seulement que l’un et l’autre sont associés. Si la fatigue et de faibles niveaux de testostérone sont probablement impliqués, il reste encore à le confirmer par de nouvelles expériences. D’ici là, insistent les chercheurs, il ne s’agit pas d’envoyer un message négatif sur le sport. Le Pr Lopès le souligne: «Les problèmes ne concernent que les sportifs de haut niveau.» Et puis cette étude prouve aussi que la pratique d’un sport de façon modérée va de pair avec une libido en bonne forme.