Le patron du géant pétrolier, Patrick Pouyanné, a déclaré ce mardi devant les députés que Total avait ''répercuté une hausse de 1,5 centime d'euros'' sur le litre d'essence après les attaques contre des raffineries en Arabie saoudite qui ont provoqué une flambée des prix.
Avec la récente flambée des prix du pétrole due à l'attaque de deux grandes raffineries en Arabie saoudite, la venue de Patrick Pouyanné était très attendue par les députés de la commission des affaires économiques qui l'auditionnaient ce mardi 17 septembre. Quelques heures plus tôt, le PDG de Total avait été mis sous pression par le secrétaire d'Etat aux Transports, Jean-Baptiste Djebbari. ''On appelle les pétroliers à la modération sur l'augmentation des prix'' a-t-il averti sur franceinfo alors que les professionnels du secteur ont tiré dès lundi la sonnette d'alarme en tablant sur une hausse de 4 à 5 centimes du litre d'essence après la réduction brutale de la production saoudienne -5,7 millions de barils par jour en moins, soit environ 6% de l'approvisionnement mondial. Un scénario redouté par le collectif des ''Gilets jaunes citoyens'' qui a réclamé mardi un ''gel immédiat'' des prix des carburants et lancé une pétition visant à freiner les effets de la flambée des cours du pétrole.
''J'ai bien entendu les appels du gouvernement, a tenté de rassurer Patrick Pouyanné. Nous avons pour l'instant répercuté une hausse de 1,5 centime d'euros.'' Si les prix restent supérieurs de 10% à ce qu'ils étaient avant les attaques contre les sites pétroliers saoudiens, ''la hausse pourrait aller au maximum jusqu'à 5 centimes'' a également ajouté le patron de la major française. Ce dernier a toutefois tenu à préciser qu'après la très forte hausse des cours lundi (+10%), la tendance mardi était plutôt à l'apaisement. ''Aujourd'hui les cours étaient orientés à la baisse par rapport à la veille et je rappelle qu'avant cet événement majeur (les attaques contre les sites saoudiens samedi, Ndlr), nous étions aussi dans une logique baissière.''
''Nous gagnons un centime d'euros par litre vendu'' Interrogé par les députés sur le fait que les pétroliers répercuteraient davantage les hausses du baril que les baisses, Patrick Pouyanné s'est voulu catégorique. ''Nous gagnons un centime d'euros par litre (d'essence) vendu en France. Cela est vrai à la hausse comme à la baisse. Nous ne cherchons pas à gagner plus que ce centime. Et il faut aussi préciser que les cours pétroliers ne déterminent qu'une partie du prix à la pompe.'' En effet, les cours pétroliers, représentent environ 30% du prix des carburants -le solde étant composé pour plus de 60% de plusieurs taxes et pour environ 10% de marge bénéficiaire des groupes pétroliers et des distributeurs.
S'agissant de la situation géopolitique dans le Golfe, le PDG de Total s'est montré préoccupé. ''Je serais surpris qu'on s'arrête là. Je suis profondément inquiet concernant l'escalade qui s'est produite au Moyen-Orient. Nous n'avons jamais vu dans l'histoire de la région une telle attaque entre des pays du Golfe. Même aux pires moments de la guerre Irak-Iran (1980-1988), il y avait eu des installations attaquées, mais cela était moindre. Là, s'attaquer à la moitié de la production saoudienne, ne va pas être sans conséquences''. A ce titre, l'arrivée mardi en Arabie saoudite du chef de la diplomatie américaine Mike Pompeo pour ''évoquer'' la ''réponse'' des Etats-Unis aux attaques pourrait déboucher sur des décisions importantes. L'administration américaine a clairement accusé l'Iran d'être responsable des attaques qui ont frappé la production du premier exportateur mondial de brut.
Par ailleurs, selon plusieurs sources contactées par Challenges, le haut niveau des cours de l'or noir pourrait persister en raison des difficultés que rencontrent la plupart des raffineries saoudiennes. ''Hormis la plateforme Satorp à Jubail, gérée par Aramco et Total, et qui est capable de transformer du pétrole brut lourd et soufré, les autres raffineries tournent au ralenti car elles ont peu de brut qui arrive'', confie un expert du secteur basé dans la région. Selon le site spécialisé Energy Intelligence, Aramco était proche lundi de rétablir entre 30 et 40% du manque à gagner résultant des attaques. Mais la compensation des 60 à 70% restant pourrait prendre plusieurs semaines. ''Les dégâts sont importants et il est illusoire de penser qu'Aramco puisse faire des miracles. Cela prendra au minimum un mois'', ajoute le même expert cité plus haut.