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Crise anglophone au Cameroun : Bamenda en proie au doute après la levée du couvre-feu
Confrontés à de nouvelles attaques attribuées aux milices sécessionnistes, les habitants de Bamenda peinent à reprendre leurs habitudes alors que la levée du couvre-feu, imposé depuis dix mois, vient d'être décidée par le gouverneur de cette région du Nord-Ouest.

Les habitants de Bamenda demeurent dans l’incertitude après la levée du couvre-feu nocturne, décidée le 14 juin par l’autorité administrative de cette région du Nord-Ouest. Alors que les déplacements sont à nouveau autorisés entre 18h et 6h, de nombreux habitants de Bamenda ont préféré rester chez eux dans le week-end une fois la nuit tombée. Seuls de petits groupes d’individus – des jeunes pour la plupart – étaient visibles dans les rues.

« Je ne peux pas prendre le risque de sortir dans la nuit actuellement. Tout semble normal, mais on ne sait pas quand ça peut dégénérer. Je préfère rester chez moi », a indiqué une habitante du quartier Nkwen, contactée par Jeune Afrique.

La confiance de la population tarde à revenir, et pour cause, les violences n’ont cessé malgré la levée du couvre-feu par le gouverneur Adolphe Lele Lafrique. Le lendemain, quatre policiers ont été tués et six autres blessés dans un attentat à l’engin explosif dans la région voisine du Sud-Ouest. Selon le ministre de la Communication, René Emmanuel Sadi, ces éléments des forces de sécurité auraient roulé sur une mine posée dans la ville d’Eyumojock, dans le département de la Manyu.


Tentative d’un retour à la normale

Cette « restriction sécuritaire » avait été imposée en septembre 2018 par le gouverneur de la région, afin de prévenir les attaques des milices sécessionnistes. Celles-ci avaient alors franchi un nouveau cap, avec l’attaque d’un convoi de transport en commun et une interruption momentanée de l’axe Bamenda-Yaoundé.

Joint par Jeune Afrique, le gouverneur Adolphe Lele Lafrique n’a pas souhaité donner les raisons de sa décision mettant fin au couvre-feu. Dans ses services, des sources indiquent néanmoins que cette décision s’inscrit dans la « ligne d’apaisement » engagée par le gouvernement, et défendue par le Premier ministre Joseph Dion Ngute lors de ses descentes dans les deux régions anglophones en mai dernier.


Dialogue au point mort

La volonté affichée par le gouvernement de résoudre la crise anglophone se heurte à l’entêtement des activistes sécessionnistes, qui souhaitent dialoguer avec le gouvernement sous certaines conditions. Il s’agit entre autres de la présence de parties tierces, et sa tenue dans un pays neutre.

Le régime de Yaoundé semble cependant réfractaire à l’idée, la crise anglophone étant selon lui un « problème interne qui doit être résolu en interne ».

Au sein de l’opinion, les acteurs s’interrogent sur la volonté réelle du gouvernement à engager le dialogue qu’il défend. « Le spectacle auquel se livre le gouvernement est tout sauf une volonté de dialoguer », affirme à cet effet Xavier Messe, un célèbre journaliste local. « Pour dialoguer, il faut arrêter les thèmes, définir le format de la table de discussions, désigner des représentants, choisir un lieu avant de commencer (…). Danser avec les populations, rencontrer des personnes acquises au pouvoir c’est tout sauf le dialogue », explique-t-il.

Source: Jeune Afrique