L'Organisation mondiale de la santé craint que le virus apparu en Chine ne se propage à des pays où les systèmes de santé sont plus faibles.
C'est une nouvelle étape dans l'épidémie du nouveau coronavirus apparu en Chine et qui s'est désormais étendue à plusieurs pays du monde. L'Organisation mondiale de la santé a déclaré ce jeudi qu'il s'agit d'une urgence internationale, appelant toutefois à ne pas limiter les voyages. « Je déclare l'épidémie une urgence de santé publique de portée internationale », a lancé le directeur de l'OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus, en conférence de presse. « Notre plus grande préoccupation est la possibilité que le virus se propage dans des pays dont les systèmes de santé sont plus faibles […]. Il ne s'agit pas d'un vote de défiance à l'égard de la Chine », a-t-il assuré.
Si l'essentiel des contaminations a été détecté en Chine continentale, 18 autres pays sont touchés, avec plus de 80 cas confirmés au total, selon l'OMS. « Bien que ces chiffres [en dehors de la Chine, NDLR] soient relativement faibles […], nous devons agir ensemble pour limiter la propagation », a expliqué le directeur de l'OMS. Signal inquiétant, des transmissions interhumaines ont été enregistrées hors de Chine, en Allemagne, au Japon, au Vietnam, aux États-Unis et en France.
Contre les restrictions de circulation
Néanmoins, le directeur de l'OMS a souligné que l'organisation estimait qu'il n'y avait pas lieu de limiter les voyages et les échanges commerciaux avec la Chine. « L'OMS […] s'oppose même à toute restriction aux voyages », a-t-il insisté. Dans un communiqué, le comité d'urgence a expliqué que ces restrictions à la circulation des personnes et des biens pendant une urgence de santé publique peuvent être « inefficaces », perturber la distribution de l'aide et avoir des « effets négatifs » sur l'économie des pays touchés.
En ayant déclaré l'urgence internationale, l'OMS a désormais le droit d'interroger les pays sur les restrictions aux voyages qu'ils vont imposer ou ont déjà imposé, a expliqué le président du comité d'urgence, Didier Houssin, donnant en exemple « les visas refusés, la fermeture des frontières, la mise en quarantaine de voyageurs qui sont en bonnes conditions ». La semaine dernière, l'OMS avait estimé qu'il était « trop tôt » pour décréter l'alerte mondiale, mais l'apparition de cas de transmissions interhumaines en dehors de la Chine a fait pencher la balance.
8 900 cas en Chine continentale
L'épidémie a fait 43 morts supplémentaires dans la province du Hubei, dans le centre du pays, ont annoncé vendredi les autorités sanitaires locales. Après ce nouveau record quotidien, le total national de l'épidémie passe ainsi à 213 morts. L'épidémie a également fait plus de 1 200 contaminations supplémentaires au Hubei au cours des 24 dernières heures, portant le total national à 8 900 cas. Un bilan qui dépasse désormais largement celui (5 327) de personnes infectées par le Sras en 2002-2003. Wuhan, métropole du centre de la Chine d'où est partie l'épidémie, est coupée du monde depuis une semaine, comme la quasi-totalité de la province environnante du Hubei.
La Chine a indiqué vendredi qu'elle allait envoyer des avions civils pour ramener vers Wuhan les habitants de la ville se trouvant à l'étranger, et ce « aussi rapidement que possible », a annoncé vendredi le ministère chinois des Affaires étrangères. Le gouvernement a pris la décision d'intervenir en raison des « difficultés pratiques auxquelles sont confrontés à l'étranger les résidents de la province du Hubei, et en particulier ceux de Wuhan », a indiqué dans un communiqué Mme Hua Chunying, porte-parole de la diplomatie chinoise.
Frontières fermées entre la Russie et la Chine
Alors que ce cordon sanitaire imposé le 23 février interdit à quelque 56 millions d'habitants de quitter la région, les États-Unis et le Japon ont évacué mercredi une partie de leurs ressortissants. Les deux pays ont également recommandé à leurs ressortissants d'éviter les voyages non indispensables Chine. Un deuxième avion américain est attendu dans les prochains jours. Un avion français en a décollé vendredi de Chine avec 200 Français à bord. Un second vol de rapatriement est prévu plus tard cette semaine pour évacuer d'autres Français et des ressortissants d'autres pays européens. Un avion espagnol affrété en coopération avec Londres doit également rapatrier vendredi environ 200 personnes, dont 150 Britanniques, une vingtaine d'Espagnols et d'autres Européens.
Les mesures de précaution internationales se durcissent, avec notamment la Russie qui a annoncé qu'elle fermerait vendredi ses 4 250 kilomètres de frontière avec la Chine. L'OMS n'a jusqu'ici utilisé le terme d'« urgence de santé publique de portée internationale » que pour de rares cas d'épidémies requérant une réaction mondiale vigoureuse, dont la grippe porcine H1N1 en 2009, le virus Zika en 2016 et la fièvre Ebola, qui a ravagé une partie de l'Afrique de l'Ouest de 2014 à 2016 et la République démocratique du Congo depuis 2018.