Les lanternes de la bonne gouvernance et du respect des droits de l’homme se sont posées ces jours-ci sur le régime du président Paul Kagame, éreinté par une affaire « d’assassinat » et une autre de pression sur les médias.
Les lanternes de la bonne gouvernance et du respect des droits de l’homme se sont posées ces jours-ci sur le régime du président Paul Kagame, éreinté par une affaire « d’assassinat » et une autre de pression sur les médias.
Les grands travaux lancés par le gouvernement rwandais ou encore la croissance prévisionnelle de 8 % annoncée par le Fonds monétaire international pour 2020 ont bien du mal à dissiper les diatribes des opposants à Kigali. Le Rwanda est de nouveau convoqué au tribunal de la liberté des droits humains alors que la mort du chanteur gospel Kizito Mihigo suscite interrogations et suspicions.
Selon la version officielle, cet artiste critique du président Paul Kagame se serait donné la mort dans sa cellule, ainsi que l’a annoncé la police rwandaise dans un communiqué diffusé le lundi 17 février. Le chanteur avait été arrêté jeudi dernier par le Rwanda Investigation Bureau pour corruption et tentative de sortie illégale du pays. Il est notamment suspecté d’avoir voulu traverser la frontière avec le Burundi afin d’y rejoindre un groupe rebelle.
Dans un pays où des personnalités critiques du régime ont parfois trouvé la mort de manière suspecte, ce récit de l’histoire a du mal à convaincre. Ancien chouchou de Kigali, Kizito Mihigo qui s’est fait le chantre de la réconciliation au Rwanda, avait fini par susciter l’ire du régime en raison de ses chansons qui remettaient en question le contrôle strict du gouvernement sur l’héritage du génocide de 1994.
Sur les réseaux sociaux, des internautes assimilent sa mort à un coup de force du régime rwandais. « En toute liberté et impunité @PaulKagame
Tue et extermine toute voix discordante, sous le regard hypocrite de la communauté internationale, le chanteur KIZITO MIHIGO, retrouvé mort dans les locaux de la police rwandaise », avance par exemple cet internaute.
« Les mains ensanglantées du pouvoir réactionnaire de Kigali viennent d’étrangler dans sa cellule, une voix discordante. Un régime assassin qui dirige la francophonie. Paix à l’âme de #KIZITOMIHIGO, son esprit survivra pendant que ses bourreaux iront se pendre en enfer », renchérit Claudel Lubaya, un ancien gouverneur du Kasaï-oriental et proche de l’opposant Moïse Katumbi en République démocratique du Congo, où la mort du chanteur a également suscité l‘émoi.
Une polémique dont Kigali aurait pu se passer alors que les syndicats de la presse sénégalaise et au-delà s’insurgent contre le licenciement d’un journaliste congolais de la BBC Afrique après des pressions émises par le gouvernement rwandais. Jacques Matand Diyambi, en poste au bureau dakarois de la radio britannique a été licencié en raison d’une interview qu’il a réalisée avec l’essayiste controversé franco-camerounais Charles Onana sur le rôle de la France au Rwanda.
A la suite de cette interview diffusée par la BBC les 20 novembre et le week-end des 23 et 24 novembre 2019, “le gouvernement rwandais a accusé la BBC d’avoir été injuste, biaisée et inexacte, et a indiqué qu’il se réservait le droit de prendre des sanctions à l’encontre de la BBC”, soulignait du reste la lettre de notification de licenciement de M. Matand.
Du point de vue des employés de la BBC Afrique et des syndicats, cependant, il ne s’agit ni plus ni moins d’un licenciement abusif qui témoigne du manque d’indépendance de la radio britannique, mais aussi du désir du gouvernement rwandais de contrôler les médias, même hors de son territoire.
En dépit de ses performances économiques saluées à travers le monde, le Rwanda est considéré comme l’un des régimes les plus fermés sur le continent. Son président Paul Kagame est couramment pointé par les ONG de défense des droits de l’homme pour des pratiques dictatoriales. Mais il s’en est toujours défendu.