Il s'agit de l'épilogue de plusieurs mois de la crise politique provoquée par sa mise en cause dans l'assassinat de son ancienne épouse en 2017.
Le Premier ministre du Lesotho Thomas Thabane a annoncé lundi 18 mai sa démission, épilogue très attendu de plusieurs mois d'une crise politique provoquée par sa mise en cause dans l'assassinat de son ancienne épouse en 2017. Thomas Thabane et son épouse étaient en instance de divorce depuis plusieurs années. « J'ai décidé de vous annoncer personnellement que je quitte mes fonctions de Premier ministre du Lesotho. Je voulais que vous l'entendiez de la bouche du cheval », a déclaré à la presse le chef du gouvernement âgé de 80 ans, depuis sa résidence. Mais l'homme, dont le mandat devait s'achever en 2022, n'a pas précisé si son retrait était immédiat.
Un épilogue très attendu
Au pouvoir depuis près de trois ans, Thomas Thabane, cinquième Premier ministre depuis 2014 de ce petit royaume, est soupçonné depuis le début de l'année d'avoir participé à l'assassinat de son ex-femme, Lipolelo Thabane, quelques jours avant de prendre ses fonctions.
Lâché par son propre parti, la Convention de tous les Basoto (ABC), et sa coalition gouvernementale, il a jusque-là résisté à tous les appels à la démission. Pressé de prendre sa retraite au plus vite, il ne s'était engagé à quitter ses fonctions que « d'ici à la fin juillet », en raison de son âge.
Le mois dernier, Thomas Thabane n'a pas hésité à faire descendre l'armée dans les rues de la capitale Maseru pour, a-t-il justifié, « restaurer l'ordre » face à ses ennemis politiques, qualifiés de factieux. Sur médiation sud-africaine, la coalition gouvernementale s'est alors engagée à permettre une sortie « digne » du Premier ministre. Mais celui-ci s'est ensuite à plusieurs reprises refusé à fixer la moindre date pour son départ.
Il a fallu que sa coalition lui retire son soutien, il y a une semaine, et annonce que le Parlement se réunirait le 22 mai pour approuver la nomination d'un successeur pour que le royaume entrevoie enfin la fin de la crise.
Thabane avait annoncé le lendemain à l'AFP qu'il présenterait rapidement sa démission au roi Letsie III mais n'en a rien fait.
C'est finalement lundi, après l'approbation par le Conseil d'État de la nomination de l'actuel ministre des Finances Moeketsi Majoro à son poste, que Thomas Thabane a rendu les armes. « Il est très difficile de se décider à quitter une chose à laquelle vous êtes habitué et de tourner le dos aux gens, mais il faut tous partir à un moment ou un autre », a-t-il dit.
Lors de l'entretien accordé la semaine dernière à l'AFP, le désormais ex-Premier ministre, roué et tenace, avait nié toute responsabilité dans la crise et assuré avoir retardé son départ pour mieux préparer sa jeune garde.
« J'ai toujours dit que j'essaierai de donner l'exemple que les dirigeants africains doivent se retirer d'eux-mêmes », a-t-il plaidé. « Mais les jeunes ont pensé que je les jetais aux loups (?) je ne voulais pas partir comme un voleur. »
Coup de théâtre sur coup de théâtre
L'octogénaire a également répété à l'AFP qu'il n'avait aucun lien avec le meurtre de son ancienne épouse. « Je n'ai tué personne, certainement pas ma femme », s'était indigné Thomas Thabane. « C'est vrai, nous avions eu une dispute (?) quand c'est arrivé, mais je ne sais rien de ce qui s'est passé. Ce (le meurtre, NDLR) n'est pour moi qu'une source de grande peine et d'immense embarras. »
Le 14 juin 2017, Lipolelo Thabane, âgée de 58 ans, était assassinée alors qu'elle rentrait chez elle en voiture dans la capitale Maseru. Ce crime était intervenu deux jours seulement avant la prestation de serment de Thomas Thabane au poste de Premier ministre. Le couple était alors en instance de divorce. Lors de sa prise de fonctions, le 16 juin 2017, Thomas Thabane était assis aux côtés de celle qui allait devenir deux mois plus tard son épouse, Maesaiah. L'enquête sur le meurtre de Lipolelo Thabane a piétiné pendant deux ans.
Début février 2020, Maesaiah Thabane, 43 ans, a été inculpée du meurtre de sa rivale. Quelques jours plus tard, le Premier ministre devait lui aussi être inculpé avant sa fuite en Afrique du Sud. Il a ainsi démenti l'implication de sa deuxième épouse dans ce même entretien.
Thomas Thabane a enfin nié avoir négocié la moindre impunité face aux poursuites judiciaires qui le menacent. « Tout ce que je souhaite, c'est toucher ma retraite et qu'on me laisse tranquille », a-t-il assuré, « tout le reste, c'est n'importe quoi ».
Enclavé au milieu de l'Afrique du Sud, le Lesotho a connu depuis son indépendance en 1966 une histoire politique instable, rythmée de coups d'État militaires.