Story

 
Football  
Foot féminin: France, Canada, Espagne… les joueuses se révoltent à quelques mois de la Coupe du monde
L’annonce a fait l’effet d’une bombe. Ce vendredi en début d’après-midi, Wendie Renard a annoncé qu’elle se mettait en retrait de la sélection tant que Corinne Diacre et son staff seront en place.

''C'est un jour triste mais nécessaire pour préserver ma santé mentale. C'est avec le cœur lourd que je viens par ce message vous informer de ma décision de prendre du recul avec l'équipe de France. Je ne ferai malheureusement pas cette Coupe du monde dans de telles conditions. Mon visage peut masquer la douleur mais le coeur, lui, souffre... et je n'ai plus envie de souffrir'', écrit la défenseure de l’OL. Un acte rapidement suivi par Kadidiatou Diani et Marie-Antoinette Katoto, deux autres cadres de l’équipe de France.

Après la capitaine des Bleues Wendie Renard, Katoto met également entre parenthèse sa carrière internationale ''tant que les changements nécessaires ne seront pas appliqués.''

Une décision forte qui intervient trois jours après la victoire lors du Tournoi de France, mais surtout à cinq mois de la Coupe du monde féminine, prévue l’été prochain en Australie et en Nouvelle-Zélande (20 juillet-20 août). Une compétition que les Bleues n’ont toujours pas remportée.

Ce séisme vient mettre en lumière l’ambiance pesante au sein du groupe tricolore depuis la nomination de Corinne Diacre à la tête des Bleues, en 2017. La capitaine et la sélectionneure n’en sont pas à leur premier désaccord, puisque l’ancienne entraîneuse de Clermont lui avait retiré le brassard de capitaine dès sa nomination, avant de le lui rendre en septembre 2021.

Bouhaddi, Henry, Le Sommer… Plusieurs cadres haussent le ton

Bien avant Wendie Renard, d’autres joueuses de l’équipe de France avaient dénoncé le management de Corinne Diacre. En 2020, Sarah Bouhaddi, ancienne gardienne des Bleues, avait fustigé le ''climat très négatif'' autour de Diacre, estimant qu'il était ''impossible'' de ''gagner un titre avec cette sélectionneure''.

Quelques semaines plus tard, c’est Amandine Henry, pourtant capitaine aux débuts de Corinne Diacre, qui avait fracassé la coach après ne pas avoir été retenue lors d’un rassemblement en novembre 2020.

“Quand elle m’a appelé, l’appel a duré 15 secondes. Je m’en souviendrai toute ma vie, racontait la joueuse de l’OL sur Canal+ au sujet du coup de téléphone de Diacre, la veille de la liste. Elle m’a dit ‘Amandine, la liste sort demain, tu n’y sera pas par rapport à tes performances actuelles’. Je reste sans voix deux secondes. Je lui ai dit ‘Ok’. ‘Bon match’, ‘Au revoir’. C’est tout. Si c’est un choix sportif, tu essaies de remobiliser ta joueuse, tu lui dis ‘t’inquiètes pas, ça va aller, tu vas revenir à ton meilleur niveau’. Mais là, cette discussion restera gravée dans mon cœur. Cela faisait un moment que j’avais des retours de toutes les filles, de Lyon ou d’autres clubs, assez pesants et négatifs, raconte l’internationale française. On s’est dit que sa venue était une aubaine, on s’est dit que c’était le moment ou jamais. On voulait vraiment parler entre quatre yeux, et se dire en toute franchise les choses qui n’allaient pas. Je pense que la coach en a eu écho, que le président lui a passé un coup de fil après, ce qu’elle a mal perçu. Je pense que le problème vient de là.”

Certains choix de Corinne Diacre ont également beaucoup fait parler, à l’image de la mise en retrait d’Eugénie Le Sommer, la meilleure buteuse de l’histoire des Bleues (86 réalisations). Lors de différentes conférences de presse, la sélectionneure a souvent utilisé l’argument du “choix à l’instant T” pour justifier sa décision.

En Espagne, 15 joueuses ont claqué la porte de la sélection

Sur fond de divergences avec l’entraîneur Jorge Vilda, maintenu en poste après l’élimination en quart de finale de l’Euro 2022, 15 joueuses de la sélection espagnole ont claqué la porte en septembre dernier après avoir envoyé un e-mail à leur Fédération, dans lequel elles affirment que la situation autour de l'équipe nationale affecte ''sérieusement'' leur ''état émotionnel'' et leur ''santé''.

''La RFEF ne va pas permettre aux joueuses de remettre en cause la continuité du sélectionneur national et de son staff technique, car prendre ces décisions ne relève pas de leurs compétences'', a déclaré la Fédération. Parmi celles ayant annoncé leur départ, figurent les joueuses de Barcelone Patri Guijarro, Mapi Leon, Sandra Panos, Aitana Bonmati, Claudia Pina et Mariona Caldentey.

Cible numéro 1 des joueuses, Jorge Vilda s’était montré ”profondément touché” devant les médias. “La plus grande douleur est de voir ce que cela nous a coûté d’arriver jusqu’ici et de constater qu’en raison d’intérêts particuliers, tout ce bazar a été monté. Ce n’est bon pour personne, c’est ridicule à un niveau mondial”, avait-il commenté.

Les Canadiennes forcées d’interrompre leur grève

Au début du mois de février, les joueuses du Canada, championnes olympiques en titre, ont décidé de faire grève pour dénoncer le manque de considération de leur Fédération par rapport à l’équipe masculine. D'après la capitaine de l'équipe, Christine Sinclair, en 2021, la Fédération a accordé plus de 11 millions de dollars canadiens (un peu plus de 7 millions d'euros) à l'équipe masculine, contre environ 5 millions de dollars canadiens à l'équipe féminine, alors que l'année précédente, les dépenses consacrées par la Fédération étaient quasiment identiques: un peu plus de 3 millions de dollars pour les hommes et 2,8 millions pour les femmes.s

Sous la menace d’une action judiciaire à leur encontre par la Fédération, les Canadiennes ont arrêté leur grève, ne pouvant se “permettre” de tels “risques”, mais a rappelé qu'elle continuait de ''croire que les coupures'' budgétaires ''sont inacceptables'' et que s'il n'y avait pas d'action collective, ''rien ne changerait jamais''. De leur côté, les joueurs masculins, qui ont disputé le Mondial 2022 au Qatar l'hiver dernier, ont déclaré ''soutenir de tout coeur'' les joueuses dans leur démarche.

Les pionnières américaines

Quadruples championnes du monde, les Américaines ont été les premières à obtenir un salaire identique et des primes strictement égalitaires avec leurs homologues masculins. Cet accord historique, conclu en mai 2022, a mis fin à plusieurs années de conflit entre les deux parties.

''Les deux conventions collectives, qui courent jusqu'en 2028, garantissent l'égalité salariale grâce à des conditions économiques identiques, a indiqué US Soccer dans un communiqué. Ces conditions économiques comprennent une compensation identique pour toutes les compétitions, y compris la Coupe du monde de la FIFA, et l'introduction du même mécanisme de partage des revenus commerciaux pour les deux équipes. Grâce à ces accords, les joueurs de l'équipe nationale américaine resteront parmi les mieux payés au monde.''

En Norvège, le coup de force d’Ada Hegerberg

Première Ballon d’or féminin, Ada Hegerberg avait été l’une des pionnières à prendre la décision de s’écarter de sa sélection en 2017, quelques mois après un Euro catastrophique et une élimination dès la phase de groupes. L’attaquante de l’OL avançait des inégalités femmes/hommes dans les primes versées par la Fédération.

En mars dernier, à quelques mois de l’Euro en Angleterre, la joueuse de 26 ans a finalement effectué son retour en sélection après avoir pris une décision qu’elle ne “regrette pas”. “J’ai pu avoir des conversations très honnêtes avec la Fédération, via Lise (Klaveness, la présidente)”, expliquait la Norvégienne au moment de revenir en sélection. Des motifs d’espoir pour les autres Fédérations?

Source: avec RMC Sport